Auteur : Lina Alami
Comprendre l’innovation en 4 courbes : Shumpeter, Rogers, Gartner, Kubler-Ross, que disent leurs courbes sur l’innovation moderne ?
Cycle de l’innovation de Schumpeter, courbe d’adoption de l’innovation de Rogers, courbe du Hype de Gartner, mais aussi courbe du changement de Kubler-Ross, que disent ces courbes sur l’innovation moderne ? En synthèse, elles permettent de saisir 4 enjeux du management de l’innovation moderne : innover vite, penser usage(r) au-delà de technologie, fédérer en co-construisant l’innovation et faire adhérer en accompagnant le changement.
Schumpeter : des cycles d’innovations majeures de plus en plus courts
D’un point de vue macro, les cycles d’innovations majeures s’accélèrent. Schumpeter (sur la base des travaux de Kondratieff) explique que les innovations naissent en grappe à l’issue d’une innovation de rupture technologique ou scientifique.
Comme le montre le schéma ci-dessous, ces cycles d’innovations majeures se raccourcissent obligeant les entreprises à la veille, à la prospective et à l’anticipation pour ne pas être dépassées lorsqu’il s’agit d’une innovation sectorielle.
Ce raccourcissement des cycles impose également à toutes les entreprises de prendre le train en marche très vite lorsqu’il s’agit d’une innovation qui touche indifféremment tous les secteurs. C’est le cas de la digitalisation ou tout au moins de sa partie émergée, celle des TIC associées maintenant à la fameuse expression ‘faire sa transition digitale’.
Mais le cycle d’innovation actuel ne se résume pas à cette seule vague. Bien que nées presque simultanément, puisque assises sur l’informatique et l’internet, il me semble plus pertinent de distinguer au minimum trois vagues :
- la vague ‘communication’ associée au Télécom
- la vague ‘transformation du vivant’ associée aux Biotechnologie et Nanotechnologie
- la vague ‘Intelligence artificielle’ associée plus largement aux Sciences Cognitives
Les deux dernières impliquant des grappes d’innovation sur des champs d’application très éloignés du seul dénominateur commun ‘ communication & digital ’.
Gartner : des cycles d’innovation technologique en deux temps
Gartner met en évidence dans sa Courbe du Hype que les innovations technologiques se font en deux temps !
Le premier temps, celui de l’espoir et de la déception
Le premier temps correspond à la découverte. La technologie porte des espoirs démesurés mais son application déçoit. Soit la technologie crée un nouveau produit ou service et il n’est pas à la hauteur des attentes. Soit il s’agit d’une nouvelle technologie qui remplace une ancienne et elle s’applique en ‘couper coller’ sans apporter de valeurs supplémentaires perceptibles mais juste du changement.
Le second temps, celui de la valeur
Quand la technologie est digérée, apparaît alors le second temps, celui qui crée de la valeur. La technologie mieux connue s’associe alors naturellement à d’autres connaissances qui, en se combinant, génèrent de nouveaux usages ou caractéristiques qui portent la valeur.
Rogers : l’adoption, clé de l’innovation !
La courbe de diffusion de l’innovation de Rogers s’apparente à celle du cycle de vie des produits (lancement, croissance, maturité, déclin) mais vu par un autre prisme, celui de l’adoption de l’innovation. C’est-à-dire l’adhésion à quelque chose de nouveau.
En management de l’innovation, la courbe de Rogers présente deux points intéressants à souligner : Co-créer avec les ‘Innovateurs’ et limiter les investissements de déploiement jusqu’au gouffre
Co-créer avec les ‘Innovateurs’
Pour s’assurer de l’adhésion des ‘innovateurs’, ils doivent être identifiés le plus tôt possible et être intégrés au processus même de conception de l’innovation. Ce facteur de réussite est un élément majeur des méthodes d’innovation telles que le Lean Startup ou les BM canvas et Lean Canvas.
Limiter les investissements de déploiement jusqu’au gouffre
Entre les ‘early adopteurs’ et la ‘majorité précoce’, Rogers alerte sur ce qu’il nomme le ‘Chasm’. Il s’agit d’une rupture dans le cycle de diffusion de l’innovation provoquée par le rejet de la majorité à l’adopter. Il est donc vivement conseillé de limiter ses investissements de déploiement avant le passage de ce cap et de rester alerte, capable de faire évoluer son innovation jusqu’au passage du cap.
Kubler-Ross : la courbe de deuil ou la conduite du changement
Autant que l’innovation présente un degrés de rupture élevé, elle transforme un existant ! Dès lors ce changement, aussi favorable soit-il, doit être accompagné.
En management de l’innovation, la courbe du changement de Kubler-Ross, apparentée à celle du deuil, doit alors être considérée à deux égards : à l’égard des destinataires de l’innovation et à l’égard de l’organisation émettrice (l’entreprise).
Du coté des destinataires
Si l’on reprend la courbe de Rogers, une fois passé les ‘innovateurs’ et les ‘early adopters’, le seul caractère nouveau de l’innovation n’intéresse pas les utilisateurs. Il faut donc porter une attention particulière à guider les usagers, expliquer les bénéfices et encourager le test pour basculer vers l’engagement.
Du côté de l’entreprise émettrice
Dès lors que l’innovation ne vient pas d’une startup (cad une entreprise dont l’organisation se structure en même temps que l’innovation grandit), il est primordial d’accompagner le changement engendré par l’innovation dans l’organisation émettrice. En effet, beaucoup d’innovations sont abandonnées, « sabotées » par les résistances collectives et individuelles faute d’une conduite du changement appropriée et engagée suffisamment tôt dans le processus de conception de l’innovation. Ce facteur d’adhésion interne à l’innovation est pourtant une condition sine qua non du succès de son introduction sur le marché.
Lina Alami
Lina Alami comment innover